EuroPHit : première rénovation française

La première maison française participant au projet européen EuroPHit vient d’achever sa rénovation. Retour sur un projet exemple, précuseur en son genre.

EuroPHit, le projet européen pour la rénovation des bâtiments au standard passif par étapes, a démarré le 1er avril 2013 et doit s’achever le 31 mars 2016.

À plusieurs mois de la date butoir de fin du projet, la France peut se targuer d’avoir l’un des premiers bâtiments ayant bénéficié des conseils et de l’appui du projet EuroPHit dans le cadre de sa rénovation. Une maison individuelle dans la région lyonnaise connaît désormais un confort optimal suite à sa réhabilitation.

Les finitions de ce projet ambitieux sont en cours

Les finitions de ce projet ambitieux sont en cours

HISTORIQUE DU PROJET

L’histoire de ce projet semble banale. Une maison, bâtie en 1975 et occupée jusqu’alors par les constructeurs. Rachetée en 2013, les nouveaux propriétaires font l’état des lieux énergétiques et il n’y a pas à tergiverser : la maison doit être rénovée.

C’est là que le projet passe du banal au pionnier. Les propriétaires ayant un projet de confort absolu dans leur nouvelle maison, mais aussi un souci d’économie d’énergie pour cette maison, c’est le bureau d’études avec lequel ils collaborent, Pollet Ingénierie, qui les aiguille vers le passif.
Le propriétaire connaît le Bâtiment Passif par le biais de sa profession et accepte volontiers de suivre cette piste. C’est quand Gérard Pollet, fondateur du bureau d’études, leur parle du projet EuroPHit et de la rénovation par étapes que tout se concrétise. Leur maison pourrait servir d’ « observatoire » au groupement européen et cela enthousiasme les propriétaires.

Il faut alors passer en revue la maison, qui est assez atypique : il s’agit d’un cube de 310 m², dont seuls 245 m² sont habitables (les 65 m² restants sont redistribués entre le garage, le cellier et le local technique) mais seul un tiers de ce niveau était réellement habité. La maison offre de bonnes surprises : des murs en béton banché, déjà isolés.
La ventilation en place, de la marque Masser qui est pionnière en solutions de chauffage, est une ventilation par insufflation, qui injecte de l’air frais dans la maison. Le chauffage est entièrement électrique, représentant 20 kW de convecteurs électriques.

Loïc Parmentier, l’architecte retenu par les propriétaires, restructure les surfaces intérieures et extérieures. À l’été 2014, tout est prêt et les travaux peuvent commencer. Date estimée de prise des locaux par les propriétaires : février 2015.

Retrouvez en vidéo les différentes étapes de cette rénovation.

UNE PREMIÈRE ÉTAPE CONSÉQUENTE

Cette première étape est très lourde, car quasiment tout l’intérieur de la maison est refait : installation d’une ventilation double flux, installation d’un poêle à bûches, isolation des murs, remplacement des fenêtres… Autant de lourdes modifications dans la maison qui lui a permis de gagner en confort en quelques semaines.

Les convecteurs électriques passent de 20 kW à 5 kW grâce à l’ajout du poêle à bois dans le séjour. Le travail sur l’étanchéité pose un problème qui n’avait pas été décelé en amont : en enlevant la membrane existante, les ouvriers découvrent un nouveau plafond, ce qui occasionne des travaux d’isolation supplémentaires. Heureusement, cette déconvenue est contrebalancée par les murs existants, faits de béton banché de 25 cm d’épaisseur. Cette technique assure une bonne étanchéité de base, et, dans ce cas, se trouve renforcée par une isolation déjà existante (10 cm de laine de verre).

L'isolation thermique extérieure est chevillée

L’isolation thermique extérieure est chevillée

Les travaux d’isolation thermique intérieure consolident cette étanchéité à l’air : les murs sont recouverts de plaques de polystyrène expansé.

Au total, de 10 cm avant les travaux, l’isolation passe à 30 cm d’épaisseur.
À l’extérieur, il n’était pas possible de rajouter 30 cm d’isolation, mais seulement 20 cm. Des plaques de 10 cm de polystyrène sont donc venues compenser l’isolation, en étant collées et chevillées au mur. Au final, la composition des murs, de l’intérieur vers l’extérieur, est faite ainsi : enduit, plaques de polystyrène, béton banché, laine de verre, briques.

Les menuiseries ont été changées pour des Smartwin de chez André Menuiserie. Une seule demande de la part des propriétaires : avoir une protection renforcée contre les intrusions au niveau des fenêtres. Pour respecter leur demande, des volets roulants ont été apposés.
Le maître d’œuvre a souhaité garder l’alignement des fenêtres pré-existantes. De ce fait, les fenêtres sont dans le plan de l’isolation extérieure et il n’y a pas de bourrelet à cause du volet roulant. Le coffrage de ce volet a pu être intégré au mur quand bien même il représentait 17 cm d’épaisseur sur les 20 cm d’isolation extérieure.

Cette pose de menuiseries a représenté un petit défi à l’équipe œuvrant sur le chantier, qui n’était pas au fait de la construction passive et de l’installation des composants idoines. Il a fallu reprendre les ponts thermiques des embrasures intérieures des fenêtres afin de garantir une étanchéité à l’air optimale. Faire des reprises sur un chantier passif est une action courante lorsque l’équipe est novice.
Cela ne retire rien à la qualité de l’étanchéité de la maison, qui sera couronnée par le test d’infiltrométrie finale, avec le score de 0,7 h-1 (le label EnerPHit, pour la rénovation, autorise une valeur de 1, et le standard passif pour la construction neuve, une valeur de 0,6).

Sur certaines fenêtres, ces volets sont équipés de lamelles orientables, ce qui leur fait jouer en plus le rôle de brise-soleil. Sur la façade sud, les fenêtres sont équipées de casquettes.

La ventilation par insufflation prééexistante

La ventilation par insufflation prééexistante

L’une des ultimes « prouesses » de ce chantier a été de réutiliser la ventilation par insufflation existante. En réduisant le volume d’air insufflé et en réutilisant les canaux de ventilation encastrés dans la maison, cette ventilation est désormais un complément de soufflage de l’actuelle ventilation double flux. Les deux points les plus conséquents du chantier, au niveau de la rénovation énergétique, ont été le changement des menuiseries et l’apposition de la nouvelle membrane sur le plancher haut et les combles.

LA DALLE S’HABILLE EN JUPE

L'isolation périmétrique de la dalle en cours d'installation

L’isolation périmétrique de la dalle en cours d’installation

L’autre mauvaise surprise du chantier vient du rez-de-chaussée qui s’avère être isolé sur 5 cm de la dalle dans la partie habitée, mais à nu côté garage. Les fondations font 50 cm de profondeur et il est impensable alors de refaire une isolation de la dalle, ce qui ferait perdre de la hauteur aux pièces du rez-de-chaussée.
Le maître d’œuvre décide alors de procéder à une isolation en jupe, soit périmétrique à la dalle. Il a fallu donc creuser et isoler, là également, avec des plaques de polystyrène, tout autour de la dalle. Cette jupe isolante s’étale jusqu’à 45 cm autour de la maison.

Cette isolation atypique clôturera le chantier, qui n’aura pris que deux mois de retard sur le planning initial. Au 31 mars 2015, tout est terminé. La maison accueille enfin ses habitants le 1er avril.

DES PROPRIÉTAIRES IMPLIQUÉS

Les propriétaires étaient enthousiastes à l’idée que leur chantier de rénovation puisse aider la recherche et l’aboutissement du projet européen EuroPHit. En plus d’accepter de rejoindre ce projet, ils ont également suivi de près le chantier, notamment en passant en revue toutes les options qui leurs étaient proposées durant la phase de conception. Leur souhait premier : ne pas avoir de reprises de travaux. Ils se sont donc orientés naturellement vers des matériaux et des techniques de tradition passive.

Ils ont également passé beaucoup de temps à comparer les différents matériaux utilisés, en les comparant les uns aux autres avant de fixer leurs choix. Ils ont également eu l’occasion de se rendre chez André Menuiserie pour mieux découvrir les huisseries et fenêtres qui seraient installées chez eux.
Les propriétaires s’installent dans une maison où les travaux extérieurs (que ce soient l’isolation ou le damage du terrain suite à la création de la jupe isolante) sont en cours de finition. Au moment où cet article paraît, les pelleteuses donnent leurs derniers coups pour remettre la terre en place dans le jardin qui sera prêt à être végétalisé.

Cette implication se poursuit dans la prochaine étape de la rénovation. La deuxième étape de la réhabilitation est celle de la rénovation de la toiture, de la végétalisation du terrain et du virage vers le bâtiment positif. L’ajout d’énergies renouvelables est au programme. Mais entre solaire thermique et photovoltaïque, leur cœur balance encore. La raison ? Le terrain est très arboré et les capteurs solaires ne pourraient pas recevoir autant d’apport solaire qu’escompté.

Vue d'une des façades terminées de la maison

Vue d’une des façades terminées de la maison

LES COÛTS ET LE FINANCEMENT

Les propriétaires sont des primo-accédants, ayant vécu en location pendant une majeure partie de leur vie. Cela leur a permis de constituer un apport confortable pour l’achat de la maison. Pour le financement des travaux de rénovation, ils ont consulté leur banque et ont exposé leur projet de réhabilitation.

Fort de leur apport et d’un plan de rénovation détaillé, ils ont su profiter des taux bas actuels et ont pu obtenir le crédit escompté pour les étapes de la rénovation.

Le total des travaux énergétiques représentent 120 000 euros, soit 390 €/m².
La rénovation a coûté au total 280 000 € soit 900 €/m².

Vous souhaitez en savoir plus sur le sujet ?
Inscrivez-vous sur le site d’EuroPHit afin de pouvoir retrouver les détails techniques de ce projet (calcul des ponts thermiques, étanchéité à l’air…) prochainement.