Les pionniers témoignent : Le premier Bâtiment passif dans le sud – épisode 2

Suite du feuilleton exceptionnel pour les 10 ans de La Maison Passive avec 4 interviews de pionniers du passif français : Cette semaine, l’épisode n°2 porte sur le premier bâtiment passif dans le Sud à Carros, en Provence-Alpes-Côte-d’Azur. Notre pionnier, Philippe Axmann, livre son témoignage.

Le premier bâtiment passif dans le Sud

LE PIONNIER : Philippe Axmann

Architecte et constructeur de maisons passives, il a conçu et construit la première maison passive dans le Sud. Il dirigeait la société Vison Eco Habitat.

« Je dis souvent à mes clients qu’ils pourront bénéficier d’une température de 23° toute l’année sans chauffage artificiel ni climatisation ! […] En tant que fervent défenseur du passif, il me semble plus important d’insister sur le confort qu’il procure et moins sur les économies de chauffage qu’il engendre. »

LE BÂTIMENT : Maison individuelle à Carros, PACA (06)

Il s’agit d’une maison unifamiliale construite sur les hauteurs de Nice, construite en blocs de coffrage.

Caractéristiques techniques :
  • Menuiseries David
  • Mixtherm
  • Menuiserie triple vitrage avec isolation renforcée… (châssis bois) Viessmann Vitotres
  • VMC double flux avec récupérateur de chaleur
  • Combiné avec ECS
  • Réchauffage de l’air neuf par puits canadien
  • Récupérateur de chaleur
  • Micro pompe à chaleur de secours
  • Eau chaude sanitaire chauffée par les panneaux solaires thermiques
  • Appoint avec pompe à chaleur.4 tonnes de CO2 épargnées chaque année
  • Récupération des eaux de pluies
  • Production d’énergie renouvelable en photovoltaïque
  • Compostage et recyclage des déchets.

Retrouvez plus d’information sur la fiche en ligne sur la base de données des bâtiments.

LE TÉMOIGNAGE DU PIONNIER

En tant qu’architecte, comment avez-vous abordé le projet de Carros ?

« Nous avons cherché à vraiment intégrer la composante du soleil, point central du concept passif. Une spécificité des maisons dans le Sud, puisque l’utilisation de bois est très peu répandue en raison de sa faiblesse d’inertie. La région réclame en effet une grande vigilance sur cet aspect pour éviter la surchauffe en été et favoriser le confort.

Nous nous sommes sentis assez libre dans l’architecture. Il était important d’associer les faisabilités de l’architecture et de permettre au passif de s’exprimer pleinement pour être le plus efficace tout en gardant en tête de maintenir un confort optimal dans la maison. Le confort est pour moi le plus gros avantage du passif. Il permet vraiment d’obtenir une température stable toute l’année, ce qui en région Sud est non négligeable. »

En 2014, l’émission E=M6 consacrait un reportage au bâtiment, pour dévoiler au grand public les avantages de ce type de construction :

Quelles évolutions la maison a-t-elle connue ?

« Depuis sa construction en 2008, trois propriétaires se sont succédés et sont tous très satisfaits de la maison. Le plus étonnant est que le prix de vente du bien était 30% au-dessus du prix du marché avec une plus value largement supérieure au prix des bâtiments traditionnels de la région (+ 150 000€).

Je savais que le passif était un véritable atout et présentait de sérieux arguments pour mettre en avant un bien, mais j’ai véritablement été surpris de cette augmentation.

Depuis le départ, la maison est équipée de triple vitrage comme beaucoup de biens dans la région. Sur les autres équipements, nous avons procédé à des ajustements. Le système de ventilation a été changé en 2010, soit au bout de 2 ans d’occupation.

Il y avait à la base un système combiné (Viessmann Vitotres) qui s’est avéré très compliqué à entretenir. Un nouveau système plus simple avec la ventilation et l’eau chaude séparés est maintenant en place et est beaucoup plus simple d’entretien (Paul Novus 300).

Avec le recul, l’équipement de la maison a été surdimensionné, notamment pour l’épaisseur de l’isolation 30 cm au lieu de 15 cm actuellement pour d’autres bâtiments du même type.

Pour le radier, notre choix s’est porté sur la marque Jackodur. C’est avant tout un bon produit mais les relations complexes avec le fabricant au Japon nous ralentissent parfois. »

 

Quelle vision du passif avez-vous ?

« Si je devais résumer le passif : des systèmes simple et efficient. Pour moi le passif gagne à être connu. Il constitue un vrai pilier du développement durable. Je dis souvent à mes clients qu’ils pourront bénéficier d’une température de 23° toute l’année sans chauffage artificiel ni climatisation !

C’est vraiment le seul mode constructif qui permet de se passer de chauffage et d’atteindre un niveau supérieur de confort. En tant que fervent défenseur du passif, il me semble plus important d’insister sur le confort qu’il procure et moins sur les économies de chauffage qu’il engendre.

En comparaison à il y a une dizaine d’année, les surfaces d’isolation diminuent. Aujourd’hui on pourrait isoler pratiquement avec les mêmes épaisseurs que dans les maisons traditionnelles simplement en changeant les matériaux. »

 Quelle est l’image du passif dans votre métier ?

« Je regrette la vision parfois réductrice du métier. Je relève une certaine réticence à la thématique de la thermique dans les écoles d’architecture.

Je dirais même que pour certains, le passif est un « gros mot ». Il ne suffit pas de faire attention à la lumière. Il faut aller plus loin.

Mais globalement, la contrainte de la compacité des bâtiments passifs est mise en avant. Il y a clairement un travail sur les mentalités à changer. L’idéal serait d’aborder concrètement la thermique en cours. Les écoles françaises d’architecture se limitent à la vision encore très artistique de la construction… »

Vous pouvez retrouver le premier épisode de notre saga, sur le tout premier bâtiment passif de France, ici . Le prochain épisode sera dédié à la première rénovation passive française…